C R É E R P O U R D E S C H E F S
Travailler pour la haute gastronomie demande des compétences techniques différentes du travail exigé par les pièces uniques. Il faut réaliser des prototypes entièrement à la main tout en ayant toujours à l’esprit qu’il va falloir être capable de décliner ce prototype en plusieurs centaines d’unités. Ces "clones" doivent pourtant avoir impérativement une aura qui leur est propre et la qualité d‘exécution doit être du même niveau que celle de la pièce artisanale. Mais là n’est pas la plus grande difficulté.
Travailler pour de très grands chefs demande avant tout des compétences sensibles différentes. Il faut comprendre profondément ce qui fait la singularité de la cuisine d’un chef dans toutes ses composantes (visuelles, gustatives, corporelles, intellectuelles, etc.) : de la création à l’expérience qu’en fera le client.
Quand je travaille "pour" un chef je n'essaie jamais de créer uniquement un bel objet. J’admire trop les cuisiniers pour faire cela. Poser un couteau sur la table d’un grand chef est un geste intrusif. Je me dois de prendre le temps de comprendre le lien entre l’individu et ce qu’il crée. Une grande cuisine est expressive et intime. Il me faut toujours anticiper le fait que "mon" couteau va devoir entrer "chez" lui. Plus encore : je sais qu’il servira de main courante à d’autres personnes lors de leur visite.
Si le couteau est au coeur de tout un ensemble d'interactions dans un environnement créatif (les contenants, les lumières, les gestes de l’équipe de salle, de cuisine, les sons, la nature environnante, la biosphère, etc.), il ne peut pas ne pas y amener une certaine violence : découper, désassembler, déstructurer, décomposer ce qui a été réuni avec sensibilité ; voilà le mode d’action d’un tranchant. Toute mon attention consiste donc à concevoir un couteau qui ne viendra pas imposer sa violence mais qui exercera sa fonction en mettant la main qui le tient dans un certain état d’élégance, de précision, d’écoute. Conduire la main du convive dans un certain état attentionnel pour qu’elle puisse décomposer avec tact et prolonger l’attention du chef.
Pour
La maison
ROELLINGER
(Cancale)
Pour
René REDZEPI
(Noma, Copenhague)
Pour
ANNE-SOPHIE PIC
(Valence, Singapour, Londres, Genève, Lausanne, Paris, etc.)
Pour
ALEXANDRE GAUTHIER
(La Grenouillère)
Pour
PAUL PAIRET
(Le Crillon, Paris)
Couteau TGV
Pour
CHRISTIAN LE SQUER
(Paris-Brest, Rennes)
Pour
YOSHIHIRO IMAI
(Restaurant MONK, Kyoto)
Pour
DAVID TOUTAIN
(PARIS)
Pour
FELIX et NIDTA ROBERT
(Arborescence, Croix)